Les coopératives au pied du mur

La FNPL a écrit aux coopératives laitières pour leur demander de jouer pleinement le jeu des Etats généraux de l’alimentation (EGA).

« L’inversion de la construction du prix, en partant du coût de production, doit s’appliquer au sein même des coopératives. Le prix du lait ne doit plus être phagocyté par un conseil d’administration qui explique aux éleveurs : je vous paierai ce que je pourrai ». Tel est le message délivré, le 23 janvier à Paris, par le président de la FNPL, Thierry Roquefeuil. Afin que les choses soient tout à fait claires, le syndicat spécialisé lait de la FNSEA « a écrit fin décembre à toutes les coopératives pour avoir un échange sur ce qu’allaient changer les EGA et évoquer trois enjeux majeurs : la rémunération des sociétaires, la performance de la coopérative, le lien entre la coopérative et ses sociétaires en termes de gouvernance », a précisé Marie-Thérèse Bonneau. La 1e vice-présidente de la FNPL compte aussi que l’ordonnance gouvernementale sur les coopératives en cours de rédaction permettra plus de transparence et de lisibilité : « en assemblée générale, le conseil d’administration devra expliquer l’écart entre le prix payé aux producteurs et le prix qui devrait découler du mix-produit de la coopérative et de l’application des indicateurs de prix interprofessionnels », souligne-t-elle en substance.

Objectif : 396 €/1000 l

Dans le secteur laitier, ces indicateurs ont été transmis à Bruxelles par l’interprofession (Cniel) pour validation. La FNPL avait révélé, à la mi-novembre, que l’ensemble des familles professionnelles (1) s’étaient mises d’accord sur ces indicateurs et avaient convenu que « le prix de revient moyen des exploitations laitières françaises conventionnelles atteint 396 euros/1000 litres ». Ces indicateurs devront obligatoirement être pris en compte, en application de la loi issue des EGA, dans les contrats conclus entre les OP (organisations de producteurs) et les transformateurs privés. Mais rien n’est dit s’agissant des coopératives, qui drainent la moitié du lait français, rappelle la FNPL. « Dans les PME et les petites coop, ça a tendance à bien marcher », observe Thierry Roquefeuil, qui se montre plus circonspect s’agissant de Sodiaal ou d’Agrial. Pourtant, de grands groupes coopératifs nord-européens comme Arla ou FrieslandCampina ont su tisser de « vrais liens avec leurs producteurs ». André Bonnard, secrétaire général de la FNPL, va plus loin : « Friesland paie bien ses producteurs sur un mix-produit export. Il n’y a pas de raison objective que les leaders mondiaux du lait ne soient pas installés en France. » Il se réjouit d’ailleurs de l’arrivée du groupe américain Schreiber dans l’Est de la France, même si, admet-il, cela pourrait passer pour une provocation.

Le prix du lait « peut s’améliorer »

En ce qui concerne le prix du lait en 2019, « les choses peuvent s’améliorer », considère le président de la FNPL. « Les stocks de poudre de lait sont quasi vides et la production est atone à cause de la sécheresse. Les premiers retours des négociations commerciales sont plutôt positifs ». Un bémol toutefois : ces négociations portent sur les produits de marques, pas sur les entrées de gammes (marques de distributeurs), dont les prix se discutent en permanence. Quoi qu’il en soit, expliquent ses dirigeants, la FNPL ne peut pas se satisfaire des 330 €/1000 l actuellement pratiqués par les leaders du marché. Certes, différents accords annoncés récemment par Intermarché, Leclerc et quelques autres mettent en avant des prix sensiblement supérieurs. Toutefois, les volumes concernés ne pèsent pas plus de 2 % de la production française, souligne André Bonnard. C’est moins que le débouché vers la Grande-Bretagne (3 %), qui pourrait être remis en cause par le Brexit.

Benoît Contour

(1) FNPL, Coordination rurale et Confédération paysanne pour les producteurs, Fédération nationale de l’industrie laitière (Fnil) et Coop de France métiers du lait pour les transformateurs.

A lire également : Le stock de poudre de lait divisé par 100 ! (24 janvier 2019)

A visionner : « Le marché des produits laitiers s’est considérablement assaini » (Benoît Rouyer, Cniel, janvier 2019)

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