Revenu : 2020 s’annonce mal

Le compte prévisionnel de l’agriculture pour 2020 anticipe une chute du revenu de 11,8%, tous secteurs confondus. L’an passé, la production laitière avait été épargnée globalement.

En 2020, la production de la branche agricole hors subventions sur les produits baisserait en valeur (-2,1%) . Les productions végétale et animale se contractent. Le repli de la production végétale (-3,1%) est toutefois nettement plus marqué que celui de la production animale (-1,0%). La baisse de la récolte céréalière est l’effet dominant). Sous l’effet de conditions climatiques défavorables, cette production recule fortement en volume (-18,7%), tandis que les prix augmentent (+8,1%), soutenus par la demande adressée à la France et des tensions sur l’offre mondiale. La production animale fléchit modérément en valeur. Les volumes augmentent légèrement, tirés par la production de lait et d’œufs. Mais les prix baissent, du fait notamment du lait et du bétail . »

Plus d’aliments autoconsommés

Côté dépenses, « en 2020, les consommations intermédiaires de la branche agricole seraient quasi stables en valeur (+0,3% après +1,2% en 2019), les prix (+0,4%) et les volumes variant peu (-0,1%). La consommation en énergies et lubrifiants poursuit sa baisse en valeur (-1,5% après -0,9%). Les dépenses en engrais et amendements augmentent un peu (+0,5% après -8,4%) du fait du rebond des volumes (+3,7% après -16,3%), alors que les prix fléchissent (-3,1% après +9,4%). La valeur des pesticides et produits phytosanitaires décroît sous l’effet des prix (-2,5%). En 2020, les achats d’aliments pour animaux auprès des industries agroalimentaires diminuent en volume (-1,8%). Cette baisse peut s’expliquer en partie par le recours accru aux aliments intra-consommés, produits directement dans les exploitations agricoles (+1,2% en volume). Les aliments pour animaux s’achètent dans l’ensemble un peu plus cher qu’en 2019 (+0,5%). Enfin, le prix des dépenses vétérinaires augmente de 2,4 %. »

Repli de la valeur ajoutée

« En 2020, les subventions d’exploitation s’élèveraient à 7,9 milliards d’euros, en repli de 375 millions par rapport à 2019 en raison de la disparition du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), transformé en allègement de cotisations patronales au 1er janvier 2019. Après prise en compte des subventions d’exploitation et des impôts, la valeur ajoutée brute au coût des facteurs diminuerait de 5,4 % en 2020. L’emploi agricole décroît tendanciellement, sous l’effet de la baisse de l’emploi non salarié. Ainsi, la valeur ajoutée brute au coût des facteurs de la branche agricole par actif baisserait de 4,7%. En termes réels, elle se réduirait de 6,5%, après une baisse de 4,3% en 2019. » Le résultat net de la branche agricole par actif non salarié – désigné couramment comme le revenu agricole – ressort au final à -11,8%.

BC

A télécharger :

L’agriculture en 2020 (Insee, 16 décembre 2020)

Le compte social agricole 2020 (Insee, 16 décembre 2020)

Bilan conjoncturel 2020 (ministère de l’agriculture, 16 décembre 2020)

Les résultats économiques des exploitations agricoles en 2019 (Insee, 16 décembre 2020)

« Une année 2020 dure pour l’agriculture » (APCA, décembre 2020)

Baromètre de conjoncture agricole (FNSEA/Ifop, 16 décembre 2020)

LES RÉACTIONS

« L’heure est grave » (FNSEA)

« Le résultat brut de la branche agricole passe de 27,7 Mds d’euros en 2019 à 25,5 Mds d’euros en 2020 et chute de 7,9% sous les effets conjugués de mauvaises conditions climatiques et de la crise Covid, celle-ci ayant entrainé des baisses de prix sur certaines filières et une chute des ventes dans d’autres du fait notamment de l’arrêt brutal des débouchés dans la restauration », explique la FNSEA dans un communiqué.

« Pour 2019, les résultats des exploitations par orientation économique ont également été publiés. Ils affichent une baisse des résultats courants avant impôts (RCAI) par unité de travail agricole non salariée (UTANS) de 2,4% par rapport à 2018. Une nouvelle fois, nous devons faire l’amer constat que non seulement 50% des exploitations françaises affichent en 2019 un résultat inférieur à 20 000 euros par UTANS, mais que ces résultats sont inférieurs à ceux des exploitations de nos principaux pays voisins, comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou le Danemark ! »

« Si des effets positifs de la loi EGAlim ont pu être constatés, en particulier sur les secteurs laitier et porcin l’an dernier, le chemin restant à parcourir pour des résultats à la hauteur des attentes est trop long. Chacun des acteurs doit prendre ses responsabilités pour construire des filières durables. La FNSEA appelle également à une accélération du mouvement de remise en compétitivité de l’agriculture française. Le plan de relance, qui appuie les investissements productifs, est un premier pas. Mais la compétitivité passe aussi par une baisse des charges, par la capacité à créer de la valeur pour les agriculteurs, et par le renforcement de la résilience des exploitations face aux aléas. »

« Pour la FNSEA, il est encore temps de redresser la situation, même si l’heure est grave. Il faut donner des perspectives aux nouvelles générations qui viennent de s’installer ou qui envisagent de rejoindre le secteur agricole ! L’agriculture est un secteur d’avenir essentiel pour l’alimentation et la lutte contre le changement climatique, à condition de permettre à ses acteurs de vivre de leur métier. »

Le « naufrage agricole » (CR)

La Coordination rurale (VR) « relève pour 2020 une prévision de résultat net par actif non-salarié agricole en baisse de 11,8 % ! Si la Commission des comptes de l’agriculture de la nation (CCAN) ne peut pas encore avancer de chiffres définitifs pour les résultats ni les investissements nets réalisés par exploitation, le plan de relance permettra-t-il de les améliorer ? »

« Les agriculteurs peuvent-ils encore s’inscrire dans la relance alors que les conséquences de la crise sanitaire sont venues s’ajouter à la crise structurelle qu’ils subissaient déjà ? », déclare Véronique Le Floc’h, 2e vice-présidente de la CR, présente à la CCAN, dans un communiqué. « Les investissements étaient de 11 milliards d’euros en 2019, un montant quasi équivalent à la décapitalisation annuelle des outils de production selon la définition de l’Insee. Les nouveaux emprunts dépasseront-ils encore les investissements, comme au moins ces quatre dernières années, et ce, malgré les subventions, notamment du plan de relance et les objets cédés ?! Autrement dit, les agriculteurs continueront-ils de sur-emprunter pour survivre ? »

« Force est de constater que le système en place sert l’économie des industriels, l’équivalent par exemple pour la filière laitière de 1,5 milliard d’euros par an d’après nos calculs. Le combat que la CR mène pour obtenir des prix rémunérateurs se justifie plus que jamais et pourrait être remporté ! »

 

 

 

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