Le lait et la viande dans le rapport Papin

Si la filière laitière « a certainement le plus bénéficié des EGA jusqu’au premier semestre 2020 », « le diagnostic n’est pas favorable » pour la viande bovine, constate le rapport de Serge Papin.

« Dans la filière laitière, Bel et Danone sont dans une démarche de progrès, mais ces derniers ne sont malheureusement pas les premiers en termes de collecte. On peut aussi signaler l’effort de Sodiaal, qui assure la collecte, même en cas de surplus », note Serge Papin, ancien PDG de Système U, dans le rapport qu’il a remis, le 25 mars, aux ministres de l’agriculture et de l’industrie. « Quoique sans doute encore insuffisants, les engagements pris et les efforts faits par la grande distribution méritent d’être salués. C’est notamment le cas pour le développement de l’achat de produits locaux. Tout comme pour la continuité, depuis trois ans, de l’augmentation des prix PGC France lors des négociations ainsi que la généralisation des contrats tripartites pour le lait de consommation. Le développement de ce même type de contrat par les distributeurs avec les filières porcines et bovines est également un exemple vertueux, qui s’est notamment traduit par une hausse des prix de 10% du steak haché consentie à l’été 2020. »

« La filière laitière, qui représente le plus grand nombre d’agriculteurs, est certainement la filière qui a le plus bénéficié des EGA , mais ce jusqu’au premier semestre 2020. Les distributeurs ont durant les deux premières négociations joué le jeu pour ce qui concerne la part PGC France (environ 20% de la collecte). La présence des distributeurs dans le collège de l’interprofession a été favorable (…) En outre, l’indicateur de coût de production pour cette filière, actuellement à 40 centimes (primes comprises), a effectivement servi de référence. Le point d’achoppement concerne le mix produits : une part importante de la collecte – 40% à 50% sous la dénomination export – est considérée comme une commodité (poudre de lait, lactosérum, beurre, fromage à l’export…) et sert d’argument pour rémunérer les agriculteurs sur la base des cours allemands, qui sont bien inférieurs aux prix français. La moyenne pondérée du cours allemand et de l’indicateur de référence de prix français est de ce fait tirée vers le bas. »

2 Smic avec Danone

« Pour obtenir un prix français stable et rémunérateur, se rapprochant du prix de référence, il faudrait davantage décorréler les grandes catégories. C’est-à-dire inclure les MDD dans le périmètre PGC France. Tout comme les fromages de marque vendus à l’export, fabriqués avec du lait français, qui dégagent une valeur ajoutée similaire à un produit vendu sur le territoire national. Ainsi, Danone, qui négocie avec ses éleveurs un revenu (supérieur à deux fois le Smic) et non pas un prix par litre, pratique un prix modulaire permettant de distinguer le lait vendu en France et à l’étranger. Enfin, même si cela est moins évident, la poudre de lait vendue pour de la production française (biscuiterie, chocolaterie, glace, confiserie…) pourrait être assimilée à une revalorisation de la poudre de lait. L’intérêt de l’outil de transparence proposé est justement de mieux appréhender ce mix produits. »

« Il convient de souligner que pour ce qui est du lait de consommation, les contrats tripartites, conclus entre des enseignes, des éleveurs et LSDH , sont un exemple, car la rémunération des agriculteurs dans ces contrats est au prix PGC France. Enfin, des initiatives telles que C’est qui le patron ?, Juste et Vendéen, Faire France ou encore Basquilait démontrent que si une juste rémunération des producteurs est assurée, les consommateurs acceptent un prix de quelques centimes supérieur. »

« Faire fi des maquignons »

« Le diagnostic n’est pas favorable pour , particulièrement déstructurée, avec une concentration incarnée par le groupe Bigard. Elle subit d’une part un déséquilibre matière, encore amplifié par la fermeture des restaurants, pour les morceaux nobles, et d’autre part la baisse des volumes. Le déséquilibre matière se traduit par un poids croissant du steak haché, au profit essentiellement du troupeau laitier. »

« L’initiative Label Rouge du troupeau allaitant est une bonne voie, mais les volumes sont encore trop faibles. Pour revaloriser la filière, il faut absolument faire fi des maquignons et contractualiser en fonction de la demande : il est indispensable de faire correspondre les besoins de l’élevage et de la consommation à un prix basé sur les indicateurs de coûts de production des viandes de qualité – mieux, mais moins. Le cheptel allaitant doit sans doute évoluer vers des races moins lourdes. »

« Les abattoirs de proximité, y compris dans leur version itinérante qui se développe mais pose encore des questions sur le plan sanitaire, méritent d’être soutenus. Ils sont un chaînon important des circuits courts. L’affichage de la provenance dans la restauration hors foyer et pour les plats cuisinés devrait être obligatoire. La question du bien-être animal – sa nourriture (démarche Bleu Blanc Cœur) et ses soins (antibiotiques ou pas) – est au cœur des valorisations. Un élément positif, les boucheries de centre-ville sont de nouveau en croissance. »

BC

A lire également :

Rapport d’information sur les pratiques de la grande distribution (Assemblée nationale, 24 mars 2021)

A télécharger :

La filière laitière, un concentré des mutations agricoles contemporaines (ministère de l’agriculture, 18 mai 2021)

Tableau de bord hebdomadaire des produits laitiers (FranceAgriMer, 9 avril 2021)

Bulletin hebdomadaire des filières ruminants (Interbev, 8 avril 2021)

Les prix des bovins du 22 au 28 mars 2021 (FranceAgriMer, 2 avril 2021)

Note de conjoncture mensuelle lait de vache (FranceAgriMer, 26 mars 2021)

Note de conjoncture mensuelle viandes rouges (FranceAgriMer, 26 mars 2021)

Lisez également

Les charges baissent moins vite

En septembre 2024,  selon Agreste, le prix d'achat des intrants agricoles continue de baisser, avec une diminution de 0,6 % par rapport au mois précédent (après une baisse de 0,9 % en août 2024).