Le syndicat réclame une « réduction obligatoire et solidaire » de la production laitière de 8 à 10 % pour limiter l’impact de la crise liée au Covid-19.
Les dirigeants nationaux de la Confédération paysanne (CP) ont détaillé, le 10 avril en conférence de presse téléphonique, les « 24 mesures pour faire face à la crise COVID-19 » qu’ils ont adressées au gouvernement et aux parlementaires. Ces mesures sont organisées autour de quatre thématiques : la continuité de l’activité agricole sur les fermes, le maintien de l’approvisionnement alimentaire dans les territoires, la viabilité à terme des fermes, le soutien aux filières de production, en particulier les laits et les viandes.
Denis Perreau, éleveur ovin en Côte-d’Or, secrétaire national de la CP, a souligné que les filières courtes avaient enduré les premières la « déstabilisation totale du système alimentaire », comme en atteste par exemple la chute « de 50 à 80% des ventes de fromage à la coupe », en particulier celles d’appellations d’origine protégée (AOP). Les filières longues n’ont pas tardé à suivre. Ce qui amène le syndicat à demander « en urgence une régulation de la production de 8 et 10 % » – il n’est plus question d’une baisse de 18%, comme revendiqué le 3 avril. « C’est un sacrifice pour les paysans au moment de la mise à l’herbe mais c’est la seule solution pour que le marché ne s’effondre pas dans les mois qui viennent. Ce qui sera stocké reviendra sur le marché demain. Mieux vaut faire des efforts tout de suite pour ne pas abandonner d’éleveurs au bord du chemin. »
« Pas de surproduction pour tenir le prix du lait »
Nicolas Girod, producteur de lait à comté dans le Jura, porte-parole national de la CP, estime pour sa part que la réduction volontaire (-2 à -5%) des livraisons de lait proposée par le Cniel « ne suffira pas à engager les gens à réduire leur production. La cagnotte n’est pas suffisante par rapport au besoin de baisse de la production. Mais ce n’est pas tant le niveau d’indemnisation qui importe. Il faut une diminution obligatoire et solidaire qui implique tous les éleveurs et toutes les entreprises de collecte, quelle que soit leur situation du moment : si certaines viennent à manquer de lait, des rachats inter-entreprises pourront s’effectuer. C’est le seul moyen de garantir que les volumes n’explosent pas et de ne pas faire exploser certaines entreprises », estime en substance Nicolas Girod. « La décision d’une réduction obligatoire de la production est d’abord politique. Ensuite, la France et l’Europe devront prévoir une indemnisation minimale », ajoute-t-il, tout en reconnaissant que « la Commission n’est pas sur cette position ».
Nicolas Girod montre en exemple l’interprofession des fromages AOP du Jura (comté, morbier, bleu de Gex) qui a décidé de réduire de 8% la production en avril, mai et juin. A côté de ça, ajoute-t-il, les principaux groupes laitiers français adressent des courriers aux éleveurs en leur demandant de réduire leurs livraisons, non sans envisager, par avance, des « baisses de prix de l’ordre de 30 €/1000 l quand c’est chiffré ». Le porte-parole de la CP se trouve renforcé dans sa conviction que, « pour tenir le prix du lait en 2020, il ne faudra pas avoir de surproduction massive à gérer. » En lait de brebis, un groupe fromager a déjà annoncé qu’il ne paierait que 90% du lait livré en avril. Et seulement 570 €/1000 l, contre 650 €/1000 l en 2019, signale encore Denis Perreau.
BC
A télécharger : Plan de sortie de crise (26 mai 2020 – Confédération paysanne, avec 19 autres syndicats ou ONG)