La clôture virtuelle doit encore faire ses preuves

Elle ne dissuade pas tous les animaux de rester dans la parcelle qui leur est assignée.

Les clôtures électriques traditionnelles sont « coûteuses, chronophages et véhiculent une image négative », constate Amélie Fischer (Institut de l’élevage), qui intervenait en visioconférence, le 24 mars 2021 devant les journées de printemps de l’AFPF (1). Une première alternative consisterait à les enterrer de sorte que l’animal qui s’en approche soit dissuadé d’aller plus loin par une alarme sonore puis, si cela ne suffit pas, par un stimulus électrique. C’est techniquement possible mais « difficile à mettre en place, à entretenir et à déplacer ». La même approche dissuasive peut être transposée en virtuel grâce à la géolocalisation par satellite. Sur le papier, les avantages sont légion : pas de clôture à installer, image de modernité, surveillance à distance via un smartphone, utilisation possible dans des endroits difficilement accessibles. D’ailleurs, le concept a d’abord été expérimenté dans des grands espaces, aux Etats-Unis ou en Norvège par exemple. Mais peut-il trouver sa place en France, sur de plus petites surfaces, avec des chargements animaux élevés et de fréquents changements de paddocks ?

Une première évaluation du matériel Nofence (Norvège) avait été réalisée à la ferme expérimentale Arvalis de Saint-Hilaire-en-Woëvre (Meuse) en 2019 (2). Elle a été étendue à d’autres sites avec un nouveau protocole en 2020, avec une durée d’apprentissage ramenée de 3 semaines à 8 jours (suppression progressive de la clôture électrique sur 2 des 4 côtés de la parcelle). Deux lots de 10 génisses ont été équipés d’un collier GPS associé à une petite batterie munie de mini panneaux solaires latéraux pour la recharge. Le maintien des animaux dans le périmètre prédéfini reposait sur une « mélodie assez stridente » à l’approche de la clôture virtuelle – essentiellement perçue par l’animal porteur et ses congénères situés à proximité – puis sur un stimulus électrique, à l’origine d’une « réaction vive des animaux », comme montré sur une vidéo. Une triple répétition des deux niveaux d’alerte sans demi-tour de l’animal signalait une échappée.

400 € par génisse

L’expérimentation montre un « apprentissage rapide » avec une nette diminution des alertes sonores et, plus encore, des stimuli électriques (moins de 3 par génisse), dès le 2e jour – preuve que les animaux « ont compris le fonctionnement » du système. Il est même observé une « habituation aux nouveaux paddocks au bout de 1 jour si l’offre en herbe est suffisante ». Cela étant, il est constaté une « forte variabilité entre individus : certains testent très peu la limite, d’autres testent beaucoup ». Pour l’heure, « Nofence est à la recherche de projets pilotes pour un premier lancement en France », signale Amélie Fischer.

Au final, la clôture virtuelle se révèle « facile à mettre en place », y compris pour les changements de paddock à partir du smartphone. L’apprentissage est « très rapide » et la plupart des animaux « restent dans la parcelle ». En revanche, l’autonomie de la batterie ne dépasse guère trois semaines pour les animaux « gros testeurs », ce qui va imposer une contention pour la changer. Cela peut expliquer que « certains animaux sortent malgré tout » – d’autres explications sont envisagées : pannes de capteur ou interférences. En conséquence, il est nécessaire de « maintenir le pourtour de la propriété en clôture physique ». Enfin, la technique se révèle « très chère » : 400 € par génisse, auxquels il faut ajouter 0,2 à 0,6 € par jour et par capteur. La question se pose de n’équiper que les animaux « testeurs », en imaginant que leur leadership ou la hiérarchie fera entendre raison à l’ensemble du troupeau. Ou pas…

BC

(1) Association francophone des productions fourragères

(2) Voir Grands Troupeaux Magazine n° 82 (juin 2020), page 38

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