La bio insuffisamment soutenue

Un rapport de la Cour des comptes insiste sur les « bénéfices de l’agriculture biologique pour la santé et l’environnement » autant que sur l’insuffisance des moyens qui lui sont alloués.

« L’agriculture biologique est le meilleur moyen de réussir la transition agro-environnementale et d’entrainer les exploitations agricoles dites conventionnelles vers des pratiques plus respectueuses de l’environnement », estime la Cour des comptes dans un rapport rendu public le 30 juin. « Cependant, la politique de soutien à l’agriculture biologique reste insuffisante : depuis 2010, les programmes d’action successifs n’ont pas permis d’atteindre les objectifs de 15% des terres agricoles en bio et de 20% de bio dans les cantines publiques en 2022 (…) Dans tous les domaines, l’action du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire n’est pas en mesure de répondre aux ambitions affichées. »

La Cour « alerte les pouvoirs publics sur le manque de communication relatif aux impacts bénéfiques du bio, et surtout sur l’illisibilité des labels qui contribue à la baisse des achats d’aliments bio en 2021 face à la concurrence croissante de labels « verts » moins exigeants – comme la mention valorisante « haute valeur environnementale » (HVE). En réalité peu exigeante en matière environnementale, celle-ci est en effet soutenue par le ministère au même niveau que l’agriculture bio. »

Par ailleurs, « les aides de la Pac que la France consacre à l’agriculture bio ne sont pas à la hauteur des objectifs qu’elle s’est fixés. La moitié de l’enveloppe a été consommée dès la première année de la programmation démarrée en 2015. En 2017, l’aide au maintien en agriculture bio a été supprimée, alors qu’elle rémunérait les services environnementaux de ces exploitations. Ainsi, un quart des exploitations bio ne touche pas d’aides de la Pac. Ce décalage entre moyens et ambitions ne pourra pas se résorber dans la prochaine Pac à partir de 2023 si la France maintient le projet actuel de plan stratégique national, qui fait l’objet d’ultimes discussions avec la Commission européenne. »

LES REACTIONS

« Le meilleur moyen de réussir la transition agroenvironnementale » (Fnab)

« C’est l’un des éléments notables du rapport, la Cour reconnaît les avantages pour l’environnement et la santé publique du mode d’agriculture biologique et sa légitimité à être fortement soutenue par les pouvoirs publics », se félicite la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab) dans un communiqué du 30 juin. « Elle démontre ce que l’on savait déjà : depuis cinq ans le soutien public à la bio a été détricoté, ralentissant drastiquement la dynamique de conversion. La Cour affirme clairement la nécessité de bien mieux rémunérer l’agriculture biologique que les labels et certifications moins exigeants comme la HVE. »

« Les attaques contre la bio ont commencé dès 2017 avec la demande publiquement faite par une partie de la profession agricole de supprimer certaines aides à la bio », commente Philippe Camburet, président de la Fnab. « Il n’est pas étonnant que, cinq ans plus tard, le marché et les filières soient dans cet état. Le monde agricole nous a lâchés mais il n’est pas trop tard pour redresser la barre. »

« Construire des filières valorisant les produits » (Chambres d’agriculture)

« Chambres d’agriculture France se félicite, dans un communiqué du 30 juin, que le rôle des Chambres soit souligné dans ce rapport. Celui-ci met en avant leur engagement sur des objectifs chiffrés dans le développement de l’agriculture biologique au sein du Contrat d’objectifs et de performance signé en novembre dernier entre les Chambres et les pouvoirs publics. »

« Avec plus d’une conversion sur deux accompagnée par les Chambres d’agriculture, ce sont près de 500 conseillers mobilisés pour appuyer les agriculteurs sur la bio. Plus de 300 conseillers sont spécialisés en bio. 45 stations expérimentales permettent l’accompagnement technique et l’innovation sur la bio. Les Chambres d’agricultures produisent des références techniques utiles aux agriculteurs et pilotent des projets avec les partenaires de la recherche. »

« La Cour des Comptes, dans son analyse économique, pointe les difficultés actuelles des filières biologiques mais centre ses recommandations sur un renforcement des aides. Pour les Chambres d’agriculture, le développement de l’agriculture biologique doit s’inscrire dans la construction de filières capables de valoriser les produits et les services auprès des consommateurs. »

« Ce rapport arrive dans une période d’inflation, où le consommateur est attentif aux prix. Il est important de maintenir une adéquation de l’offre avec la demande, de relancer la consommation en lien avec le consentement à payer du consommateur », conclut Chambres d’agriculture France.

BC

A télécharger :

La synthèse du rapport (Cour des comptes, 30 juin 2022)

Lettre ouverte de la filière bio aux distributeurs (28 nov. 2022)

Perspectives agricoles 2022-2031 (FAO-OCDE, 29 juin 2022)

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