Changement de génération à la FNPL

L’assemblée générale de la FNPL, réunie le 19 mars à Paris, a salué l’action de Thierry Roquefeuil, qui passe la main après 12 années à la présidence. L’occasion, aussi, de revenir sur près de 80 ans d’existence pour le syndicat spécialisé de la FNSEA.

C’est le 9 avril que le nouveau conseil d’administration de la FNPL, composé de 36 membres élus par les adhérents au niveau des régions laitières et cooptés (voir en fin d’article, ndlr), se choisira un nouveau bureau et, parmi ses membres, un nouveau président pour les trois prochaines années. Ce ne sera pas Thierry Roquefeuil, producteur de lait dans le Lot, qui a annoncé son retrait après « plus de 40 ans d’histoire syndicale » et une première élection en 2012 à la présidence de la FNPL. C’était encore la période des quotas laitiers, mis en place au 1er avril 1984 puis supprimés le 31 mars 2015.

Des quotas instaurés dans la douleur ainsi qu’en ont témoigné deux anciens présidents de la FNPL, Marcel Deneux (95 ans, président de 1964 à 1982) et Michel Ledru (89 ans, président de 1983 à 1989), qui ont livré quelques confidences historiques intéressantes. Dans les années 1970, « tout concourait à la hausse de la production laitière : l’arrivée du maïs, du raygrass, de la stabulation libre et de la salle de traite, l’agrandissement des fermes et des parcelles, la holsteinisation des troupeaux qui allait porter le rendement moyen de 3 000 à 6 000 l par an », se souvient Michel Ledru. Et comme « il n’y a pas de prix sans maîtrise de la production » – Marcel Deneux confie l’avoir appris chez les Jésuites, de la même façon que « le prix garanti est une douce illusion… » –, la filière laitière avait convaincu le ministre de l’agriculture de l’époque, Michel Rocard, de porter cette réforme au niveau européen. « Rocard a été un bon ministre, même pour les quotas laitiers », juge Michel Ledru. Certes, l’accueil de la mesure fut chahuté car le président de la FNSEA, alors François Guillaume, « aspirait lui-même à devenir ministre », tacle-t-il aujourd’hui. Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, a-t-il cet épisode en tête en appelant les agriculteurs à demeurer fidèles au « serment de l’unité paysanne », prononcé en 1946 par Eugène Forget, président fondateur de la FNSEA, qui rejetait l’exercice simultané d’un mandat syndical et d’un mandat politique.

« Le prix du lait ne peut plus baisser »

La gestion des quotas laitiers « a dominé mes six années à la présidence de la FNPL », se rappelle Michel Ledru. Il n’était question que de gestion des dépassements, de plans de développement, d’aides à la cessation d’activité et de débats sur le rattachement des quotas à la terre ou à l’exploitant, de départementalisation plutôt que de quotas marchands… « Certains producteurs pensaient que c’était un droit acquis mais la FNPL s’est toujours battue contre ça », assure l’ancien président de la FNPL. En Belgique, « la fin des quotas a été vécue comme une perte de fonds de commerce », reconnaît Benoît Lutgen, eurodéputé et ancien ministre wallon de l’agriculture, qui dit envier la contractualisation à la française, assez unique en Europe selon lui. « Je suis presque passé pour communiste à Bruxelles en défendant cette approche », ironise en substance Thierry Roquefeuil. Il ajoute que « le lait est La filière qui se sert d’Egalim » et qu’en conséquence « le prix du lait ne peut plus baisser ». Mais cela ne doit pas dispenser les pouvoirs publics français et européen de donner de la « lisibilité à dix ans » aux producteurs de lait, ajoute l’actuel président de la FNPL (et du Cniel jusqu’à la fin juin 2024), qui identifie un enjeu majeur pour la filière laitière : « le renouvellement des générations ».

En retour, le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, a renvoyé au plan de souveraineté de l’élevage et à la loi d’orientation en préparation. Il a surtout tenu à rendre hommage, comme avant lui le président de la FNSEA, celui des JA, Arnaud Gaillot, ou la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, à « l’engagement » et à la « détermination sans faille » de Thierry Roquefeuil, mais aussi à sa « capacité à prendre de la distance avec sérieux et humour » pour relancer une négociation. Une anecdote, peut-être ?

BC

Les 36 administrateurs 2024-2027 de la FNPL

Ouest : Marie-Andrée Luherne (56), Agnès Texier (85), Matthieu Poiroux (85), Frédéric David (35), Frédéric Vincent (49), Patrice Riauté (72), Pascal Clément (72).

Lorraine : Christophe Maginot (55), Sébastien Berot (54), Dominique Bouché (57), Yohann Barbe (88).

Alsace : Didier Braun (67).

Nouvelle-Aquitaine : Michel Casabonne (64), Christophe Limoges (79).

Ile-de-France : Christophe Pigeon (77)

Champagne : Florent Cressot (52).

Centre Val Loire : Alexis Descamps (41).

Nord Picardie Ardennes : Joseph Leterme (02), François Moreau (59), Christine Delefortrie (59), Gilles Durlin (62), Valentin Crimet (80).

Franche-Comté : Damien Paris (25), Guillaume Faucogney (70).

Bourgogne : Samuel Bulot (21).

Normandie : Franck Gremont (76), Benoît Gavelle (27), Jean-Baptiste Radigue (61), Ludovic Blin (50), Jean-Christophe Eudes (50).

Auvergne : Jean-Paul Peyral (15), Eric Richard (43)

Rhône-Alpes : Stéphane Joandel (42)

Savoie : Christophe Léger (74)

Occitanie : Clément Chayrigues (12), Filip Van de Peer (11).

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